iiwii (it is what it is) est un projet méditatif composé par le duo d’ambient-folk expérimental Myrrh wa Saphira. Nés d’improvisations intuitives, ces quatre titres sont une ode à la rêverie et à l’acceptation contemplative, une bulle féerique tissée avec douceur entre guitare mélodique, flûte enchantée, voix éthérées et chuchotements intimes. iiwii est une invitation à embrasser le cours de l’existence dans ses fluctuations poétiques et imparfaites.

Artwork de Sacha Bernardson

Sacred Sea 2025

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Comment vous décririez-vous en tant qu’artistes ?

Myrrh wa Saphira: Nous nous déployons toutes les deux à la croisée de plusieurs pratiques artistiques, la musique, la performance, l'écriture, etc. Si notre approche mêle l'art et le soin, ça n'est pas simplement une question d'esthétique mais une vraie démarche spirituelle et politique. La musique est un endroit qui permet de se connecter aux êtres de façon intuitive et sensible, de lâcher prise, d’accompagner ce que le cœur ne peut parfois pas exprimer par les seuls mots ou gestes. Le projet Myrrh wa Saphira est né d’une envie de créer des moments immersifs, parfois proches d’un rituel, où chaque individualité puisse s’abandonner et trouver sa place dans le collectif. Il émane d’un désir de se retrouver intérieurement pour mieux être au monde. Il s'ancre avant tout dans un amour sororal, un respect profond, un désir de liberté partagée, beaucoup de douceur, de rires, et l'espace immense que nous nous offrons l'une à l'autre pour explorer les champs de notre créativité commune et respective.

Comment est né Myrrh wa Saphira ?

M w S: À l'été 2021, Marion a été invitée à jouer un set d'ambient pour un événement à la Déviation à Marseille, et elle a proposé à Sarah de mixer avec elle. Nous avons eu envie d’insuffler à ce moment un aspect plus performatif et de dépasser le format dj set en partageant au micro des textes et des poèmes. La proposition a plu, et quelques mois plus tard, nous avons été invitées à jouer au Méta pour un événement du label Okvlt. À cette occasion, nous avons créé notre premier live et Myrrh wa Saphira est né. De l'ambient expérimentale à l'asmr en passant par la noise, la dimension électro-acoustique de notre projet se révèle aujourd'hui à travers des sonorités plus folk. Sarah a repris le piano et la guitare, Marion s'est remise au chant, on s'autorise à intervertir les rôles, à explorer de nouvelles façons de créer, on partage nos outils et nos techniques. Nous cherchons en permanence à dévoiler des mélodies inattendues sans jamais se limiter à un style ou à un genre particulier. Myrrh wa Saphira est aussi un espace de vulnérabilité et de spiritualité très précieux, dans lequel nous partageons des parties intimes de nous-mêmes tout en proposant au public de prendre part à un rituel immersif, sans jamais oublier de ponctuer l'ensemble par des touches d'humour et d'absurde. C'est un projet qu'on aime et qui nous ressemble, qui évolue avec nous.

Photos: Manon Tombe

Quel est votre processus de création en général ?

M w S: Notre processus de création par souvent de moments d’improvisations qui sont très spontanés. On teste généralement des choses avec des instruments qui nous sont un peu familier au début. Marion ça va être pas mal le chant et Sarah plutôt la guitare ou le piano mais on aime bien aussi échanger les rôles et tester d’autres choses. On jam avec des improvisations libres jusqu’au moment où on sent que les différents éléments se convergent et que la magie opère, et on reconnaît toutes les deux qu’il y a une mélodie, un air ou une harmonie qui s’est créée entre nous. À ce moment-là on pose un enregistreur pour ne pas oublier ce moment et plus tard on revient sur ce qu’on a enregistré pour retrouver nos trouvailles improvisées et de là on les retravaille avec un peu plus de précision. Sachant qu’on aime garder le côté improvisation dans nos morceaux quand on les enregistre ou quand on les performent en live. Ça fait quand même partie de ce qu’on aime mettre en avant, parce qu’on aime jouer sur comment on répond l’une avec l’autre aussi dans nos instruments, dans nos voix et essayer de retrouver ce moment un peu magique. Et c'est ok d’avoir des versions des morceaux qui existent en live et d’autres qui existent pour l’écoute enregistrée, c’est une différente forme d’écoute.

Quel est la démarche créative de cet ep? Dans quels lieux a-t-il pris forme ?

M w S: iiwii c’est 4 morceaux qui sont nés dans le cadre de notre résidence à La Friche Belle de Mai avec l’AMI (Aide aux Musiques Innovatrices). On travaillait notre live Le goût de la mer et il y avait vraiment des moments où on avait juste besoin de créer de la nouvelle musique, de se faire plaisir de faire de la musique ensemble sans penser aux échéances qu’on avait. C’était vraiment des petites bulles de respirations qui correspondaient aussi beaucoup plus à nos envies sur le moment puisque le live Le goût de la mer c’est un live qui a plus de trois ans. On faisait de la musique de manière très intuitive et il y a eu un moment où on s’est dit pourquoi est-ce qu'on ne sortirait pas quelque chose à côté en se mettant moins la pression avec un côté plus spontané. Du coup on a rassemblé ces quatres morceaux qui sont dans cette idée d’accepter certaines choses. C’est quelque chose que Marion dit souvent quand on rencontre des difficultés, des petites épreuves de la vie. Qu’il y a des choses où on peut pas tout contrôler, il faut apprendre à lâcher prise. Marion dit toujours “it is what it is”. Ça nous fait du bien, ça nous permet de continuer à avancer et ça faisait sens de nommer ce projet comme ça parce qu'il vient de cette énergie très spontanée et avec une envie de sortir rapidement des choses qu’on a sur le coeur et de la musique qu’on a envie de sortir en ce moment sans rentrer dans des processus très longs que l’on peut connaître dans l’industrie musicale. Il y a ce côté “let’s go!”, même si les choses ne sont pas forcément parfaites et qu’on pourrait passer des heures et des journées à revenir sur des détails, il faut savoir aussi lâcher prise à des moments pour que les choses avancent et qu’elles sortent. Puisque des fois il vaut mieux que les choses soient faites que parfaites!

Pouvez-vous nous parler de chaque morceau, ce qu’ils signifient pour vous?

M w S: Un des morceaux de l’ep s’appel iiwii également, it is what it is. Le premier morceau se nomme “for Dianna” qui est un hommage à l’artiste Dianna Lopez qui nous accompagne beaucoup. Il y a même des moments, comme par example dans les coulisses juste avant notre live au festival Jamais D’Eux Sans Toi, on s’écoutait des longs morceaux de Dianna Lopez pour se mettre dedans, ça nous faisait du bien, ça nous permettait de nous ancrer un peu. La dernière fois qu’on a joué ensemble Marion pensait à elle présente sur scène avec nous et se disait “Dianna c’est pour toi” (rires). C’est vraiment une de nos muses et une de nos inspirations, une de nos gardiennes. Elle fait des sessions sur youtube très longues de guitare et qui permettent de rentrer dans un vrai état de relaxation. Elle nous inspire pour son côté simple dans sa composition. C’est vraiment juste une guitare électrique avec un petit effet dessus, de la reverb et parfois sa voix avec des sons field recording, des sons de nature. Et c’est tout. C’est très simple et ça marche trop bien. Dans la construction de l’ep, il y a beaucoup cette acceptation là de faire des choses simples et répétitives qui sont méditatives. 

Il y a tout ce travail qui a été fait sur le mix aussi pour avoir un peu cet effet binaural et ces voix qui traversent d’un côté à l’autre. L’idéal c’est d’écouter au casque mais même sur des enceintes en stéréo il y a quand même cet aspect de lâcher prise.

Le morceau counting my blessings est beaucoup influencé par l’ASMR et la musique concrète. C’est quelque chose qui est moins présent dans nos dernières improvisations parce qu’on a beaucoup improvisé dans les studios de l’AMI dans le cadre de cette résidence qu’on à fait où il y avait moins de choses inattendus présentent dans l’espace, c’est à dire qu’on avait vraiment du matos de musique, des instruments. Alors qu’en fait notre premier ep Le goût de la mer il a beaucoup été créé dans nos chambres où on pouvait aussi jouer avec ce qui nous entourait et explorer les sonorités. Le bruit des verres, des cailloux, des plantes, des fleurs et ça, ça nous a beaucoup inspiré. C’était moins présent dans le fait de travailler dans un studio. 

Sarah: Mais on avait quand même ramener des petites choses qu’on aime bien pour jouer avec, et counting my blessing est parti de ce jeu avec des billes en verre avec lesquelles je jouais devant le micro et j’avais presque l’impression de compter comme un chapelet ces billes en les faisant tourner et cette expression m’est venue de “counting my blessings” qui est une pratique de gratitude, de savoir remercier et être reconnaissants de ce qu’on a. 

C’est quelque chose qu’on pratique beaucoup dans ma famille. On s’aime tellement qu’on se dit souvent qu’on a vraiment de la chance. Déjà d’être en bonne santé, de la chance d’être en bons termes les uns avec les autres, ce qui n’est pas le cas dans certaines familles. Et vraiment on cultive cette gratitude, et en fait ma mère, marocaine, nous dit souvent “Khamsa w khmiss”. “Khamsa” ça veut dire 5 et c’est aussi le nom de la main de Fatma qui nous protège du mauvais oeil, et “w khmiss” c’est pour faire rouler le mot dans la langue, par plaisir de faire tourner le mot quand on dit cette phrase et qu’on prend conscience de quelque chose qui est positif et qu’on veut vraiment pas que l’oeil s’abatte sur nous. Ça faisait sens avec ce ”counting my blessings” parce qu’il y a cette idée du compte et que “Khamsa” c’est le chiffre 5. Tout ça faisait sens et c’est pour ça qu’il a cette énumération des chiffres en arabe, je voulais qu'on entende ce “Khamsa” quelque part.

M w S: Et le dernier morceau, Sylphide au crépuscule, qui s’appelait “Sirène au crépuscule” au début. Il nous a été révélé qu’il s’appelait plutôt Sylphide au crépuscule. Les Sylphides étant des êtres des rivières, des génies des airs, comme des sortes de fées. Il y a quelque chose qui est proche de l’élément eau mais il y a aussi quelque chose du domaine aérien. Ça faisait sens parce que c’est le seul morceau où on utilise de la flûte. C’est d’ailleurs la première fois qu’on utilise de la flûte dans notre projet. 

Sarah: On m’a légué une flûte incroyable dont j’ignore l’origine mais que j’imagine d’origine d’Amérique Latine. Elle a une sonorité hyper profonde et on l’imaginait comme étant une sorte d’écho au loin dans un paysage, c’était les images qui nous venaient en tête. 

Marion: C’est un morceau très féérique pour le coup. Les sylphides ce sont aussi ces esprits divins féériques magiques qui sont censé protéger les jeunes filles qui viennent prendre leur bain nu à la rivière. C’est souvent la représentation qu’on en a. Et en même temps, ce sont des petits esprits qui peuvent jouer des tours. C’est à la fois des petites fées protectrices mais qui peuvent aussi jouer des tours aux personnes qui voudraient porter préjudice aux jeunes filles qui se baignent dans les rivières. 

 
 
 

À propos des artist:es

Myrrh wa Saphira est un projet musical d’ambient hybride, qui se déploie lors de performances poétiques immersives, par Saphira & Sarah Mỹ.

Les deux artistes et performeuses transdisciplinaires, animées par une démarche mêlant l’art et le soin, s’associent pour créer un voyage hypnotique jusqu’aux frontières du subconscient. Dans une navigation électroacoustique envoûtante, Saphira et Sarah Mỹ tissent les contours d’un univers mystique, dans lequel les textures et les voix s’emmêlent.

Entre méditation ASMR, ambient éthéré et rêverie absurde, Myrrh wa Saphira invite à une immersion poétique puissante et sororale.

Soundcloud - Instagram - Bandcamp

Photo: Manon Tombe